JUILLET-AOÛT 2024 Jeux Olympiques de Paris, le revers de la médaille par Diane Joris-Castel INTERVIEW Catherine Muller, championne d’Europe de tir INTERVIEW Jessica Fiscal, journaliste sportive à L’Est Républicain NUMERO SPECIAL SPORTS AVEC FRANÇOISE MBANGO, CHAMPIONNE OLYMPIQUE PAR ANTOINE OBTEL NUMÉRO 21
EDITO En ce mois de juillet, alors que certains - la majorité de l'équipe - célèbrent leur licence, d'autres préparent activement les prochains numéros. J'ai l'honneur de voir me succéder à la rédaction en chef Mademoiselle Anaïs Henry, étudiante en troisième année de licence Info-Com à Nancy. Ensemble, nous avons préparé ce double numéro estival consacré à un sujet d'actualité : le sport. On l'a vu au cours des derniers mois, les Jeux Olympiques et Paralympiques ont beaucoup fait parler, notamment en France. Cet engouement n’est pas prêt de s’arrêter puisque nous avons appris ce matin l’attribution des J.O. d’hiver 2030 aux Alpes Françaises. A l'approche des J.O.P. de Paris, évènement de la décennie en France, nous avons rencontré pour vous des sportifs qui ont marqué leurs générations. En couverture, Françoise Mbango, unique athlète camerounaise de l'histoire de son pays à avoir décroché des médailles aux J.O. nous fait l'honneur d'avoir accepté une entrevue avec Antoine Obtel, notre correspondant international. A retrouver dans ce numéro - Catherine Muller, championne d'Europe de tir, Jessica Fiscal, journaliste sportive de L'Est Républicain partie en direction des Jeux Olympiques, Tanguy Abscheidt, responsable des sportifs de haut niveau de l’Université de Lorraine, Jonathan Cecconni, athlète de l'Université de Lorraine ou encore Manon, future étudiante en STAPS. Être rédacteur en chef du journal E-Storia a un été un réel honneur, une possibilité de poursuivre le but initial du média : créer un lien entre les étudiants et l'université. Nul doute qu'Anaïs Henry poursuivra ce chemin. En espérant vous voir toujours aussi nombreux à lire cette initiative étudiante dans laquelle chacun s'engage au mieux, Cher tous, bonne lecture, longue vie à E-Storia THOMAS CHIARAZZO Rédacteur en chef d’E-Storia
sont mis en avant, la rédaction a souhaité mettre en avant le SUAPS, Service Universitaire d’Activité Physique et Sportive de l’université de Lorraine. Tanguy Abscheidt, directeur adjoint du SUAPS a répondu aux questions de Thomas Chiarazzo et Léo Marchal. Photo Thomas Chiarazzo Le SUAPS gère les installations sportives et promeut le sport auprès du personnel et des étudiants de l’université. Tanguy Abscheidt s’occupe plus particulièrement des sportifs de haut niveau et de la piscine « Les Océanautes ». Tous les étudiants de l’Université de Lorraine ont accès aux quatre établissements du SUAPS, sur les campus Lettres de Nancy, Brabois, Metz et à la piscine des Océanautes. La piscine a été rénovée il y a un an pour l’usage des étudiants, tout en réduisant la consommation énergétique, et un mur d’escalade est en construction à Metz. Le service propose des « innovations » en matière d’activités. Parmi elles, du bien-être, du volley-ball ou encore du pickleball, que Tanguy décrit comme du « tennis sur un terrain de badminton ». Concernant le badminton justement, le dernier championnat de France a eu lieu sur le campus Brabois à Nancy. Les licenciés de l’université font de « bonnes performances » mais n’ont pas accédé à cette finale. En tout, 10 700 usagers composent le SUAPS. Tanguy remarque un « effet J.O. » avec une importante couverture médiatique. Quelques étudiants pourraient participer aux Jeux Olympiques, et d’autres visent des qualifications aux Jeux de 2028. Pour Paris 2024, l’Université pourra compter sur Yann Schrub, en huitième année de médecine, sélectionné en athlétisme pour la France ; Pauline Stey, ancienne de l’IUT Charlemagne, sélectionnée en marche par équipe pour la France et Jamal Valizadeh, en M1 Informatique à Metz, sélectionné en Lutte pour l’équipe des réfugiés. Milla Massemin, en L2 Psychologie à Nancy vise une sélection en aviron pour Los Angeles 2028. Enfin, Ludwig Brouillard, dont l’interview est à retrouver dans ce numéro, est réserviste au sein de l’équipe France de boccia pour les paralympiques Paris 2024.
transmises Tanguy Abscheidt La piscine des Océanautes a été rénovée l’année dernière. Cinq complexes seront mis à disposition des étudiants à l’avenir. La course de la Saint Nicolas organisée par le SUAPS, sur la place Stanislas. par
Célébrés du 26 juillet au 11 août 2024, ils se tiendront dans la capitale, à l’exception de quelques épreuves qui se tiendront à Marseille, notamment les épreuves de voile. Si le projet s’appuie sur une grande partie de sites déjà existants et réaménagés pour l’occasion, la construction de plusieurs infrastructures a tout de même été nécessaire, tel le centre aquatique du stade de France. Si ces jeux seront sans aucun doute l’occasion pour la France de faire valoir son patrimoine, de nombreuses controverses mettent à mal les efforts des comités d’organisation : explications. La Solideo et ses sous-traitants La Solideo, acronyme de « Société de livraison des ouvrages olympiques », est une entreprise créée en 2017 spécialement pour les JO de Paris. Elle veille à la livraison des infrastructures nécessaires à la bonne tenue des Jeux. En 2023, un reportage révèle sur certains soustraitants de la Solideo, plusieurs géants du bâtiment, employaient des travailleurs immigrés sans-papiers dont la situation a depuis été régularisée. Ils dénoncent un travail « sans fiche de paie, sans contrat de travail et sans heures supplémentaires compensées ». Ils ont depuis assigné les entreprises responsables aux prud’hommes de Bobigny en SeineSaint-Denis. Le transfert des populations précaires En 2023, le gouvernement annonce vouloir inciter des milliers de sans-abris de la région d’Île-de-France à la quitter pour la province, d’ici la tenue des Jeux. A cette fin, de nombreux centres d’accueil des personnes précaires sont construits dans des villes de province, destinés à ne fournir qu’un hébergement temporaire (moins de trois semaines). En Seine-Saint-Denis, le 16 juillet 2024, une opération d’évacuation a été menée le long du canal de l’Ourcq : c’est 250 sans-abris à qui l’on propose une relocalisation, qui implique de quitter Paris. Si cette pratique se retrouve historiquement avant chaque grand évènement sportif dans le monde, on a peu de mal à imaginer les objectifs de la région, dans ce grand nettoyage social : la misère n’est pas belle sur une carte postale. Selon les collectifs de droits des personnes précaires parisiens, c’est 12 500 personnes qui sont expulsées de Paris en 2024. La mobilisation des résidences étudiantes En mai 2023, le compte X (anciennement Twitter) du CNOUS (Centre National des OEuvres Universitaires et Scolaires) annonce la demande de l’Etat de mobiliser environ 3000 logements étudiants pendant la période estivale, afin de permettre à certains personnels (soigneurs, forces de l’ordre, bénévoles) d’être au plus près des JO afin de permettre des interventions rapides. Les étudiants concernés se voient offrir une proposition de relogement ainsi qu’une prime de 100 euros et deux billets pour assister aux épreuves. Si le Conseil d’Etat confirme la légalité de l’action, on n’imagine que trop bien le désarroi des étudiants. Malgré toutes ces controverses, E-Storia souhaite aux athlètes une excellente compétition et un déroulé des Jeux libre de tout problème. Diane Joris-Castel
flambeau de la flamme olympique. De Miss France 2024, Eve Gilles au journaliste Julian Bugier en passant par la championne olympique Marie-José Perec, les plus grandes personnalités françaises ont tenu la torche. Si la plupart des porteurs ressortent ravis de cette expérience, certains en gardent un souvenir amer. C’est le cas de Stéphanie Henry, 33 ans, influenceuse, qui a porté la flamme le 22 mai dernier dans le Périgord. Après avoir porté la flamme le même jour que des centaines d’autres périgourdins, Stéphanie Henry a reçu de nombreux messages de haine. Parmi eux on peut lire « La flamme du Burger King ? » , « Ksos de la société » ou encore « ça te fera pas de mal de courir ». Des propos auxquels la jeune femme a eu du mal à faire face. A quelques jours des Jeux Olympiques, c’est la drag-queen Minima Gesté, 34 ans, qui a porté la flamme à Paris, qui a reçu des messages similaires. Depuis l’annonce de sa participation aux J.O. comme porteuse de la flamme, Arthur Raynaud de son nom civil, a connu une vague de haine. La violence fut telle que le comité organisateur des Jeux-Olympiques a décidé de ne pas autoriser son passage au public, moment que l’artiste a partagé sur ses réseaux-sociaux en disant se trouver « en larmes » quand sa mère s’est retrouvée derrière une grille pour un instant. Contactée par notre rédaction, elle n’a pas souhaité nous répondre. Mais comment expliquer que la flamme olympique crée un tel engouement auprès des français, au point de remettre en question le choix du comité ? Cécile, animatrice de l’émission radio « Des filles Sport » diffusée sur Radio Fajet explique que « le symbole de la flamme olympique est puissant » et que les critiques sont donc « proportionnellement aussi importante que les attentes, surtout avec la caisse de résonance des réseaux-sociaux ». Elle complète que certains porteurs ne sont « pas les plus merveilleux exemples de représentation des valeurs sportives de l’olympisme, comme Jul ». Des propos que corroborent Paul, correspondant sportif pour L’Est Républicain, qui explique que « les choix de représentation font autant débat par rapport au symbolisme de la flamme ». Des symboles populaires voulus par l’organisation, ce que commente Cécile : « Jul est un bon représentant de la ville de Marseille, et comme la flamme se veut ‘rassembleuse’, ça peut s’entendre ». Le passage de la flamme olympique étant payant à hauteur de plusieurs milliers d’euros pour les communes – ce qui explique son absence en Meurthe-et-Moselle – on peut imaginer des attentes de la part des départements hôtes. Pour illustrer cette idée, Cécile décide de caricaturer : « Jul attirera plus de touristes qui vont dépenser dans la ville que JeanMarie Dupont, ancien athlète de niveau régional, bénévole depuis 35 ans au club du coin, et qui aurait peut-être plus "sportivement mérité" de la porter ». L’organisation des Jeux-Olympiques de Paris voit en ce mercredi 24 juillet sa première épreuve, un match de football à Saint Etienne, tandis que les bénévoles finissent leur formation pour accueillir des touristes du monde entier durant six semaines.
Jeux Olympiques de Paris 2024 afin de couvrir une partie de la compétition pour le groupe EBRA. En dépit de quelques zones d’ombre sur l’organisation, elle ne cache pas son impatience mais aussi son appréhension devant un tel évènement. Jessica, comment t’es-tu retrouvée à aller couvrir les JO pour le journal ? « Je vais couvrir l’évènement pour le groupe EBRA (regroupant les journaux de l’Est, de Bourgogne et de Rhones-Alpes) et on nous a demandé de candidater à la fin de l’année dernière. Maxence Alibert (chef du service des sports lorrains de l’ « Est Républicain » et « Vosges Matin ») en avait parlé et j’ai alors passé un entretien. Il fallait avoir un profil moderne, être à l’aise à la vidéo, sur les réseaux sociaux… J’ai été prise, ça sera ma première grosse compétition, les premiers et peut-être derniers Jeux olympiques. Ça sera un challenge plutôt intéressant. » C’est la première fois que tu vas couvrir un évènement sportif de cette ampleur ? « J’ai toujours fait des suivis de clubs en championnat, des matchs de coupes en Rugby, mais là le rythme va être élevé. Je suis également le SLUC toute l’année mais c’est une adrénaline différente. J’ai 31 ans, je suis en début de carrière, j’ai la facilité de compréhension sur ce genre d'événement. » Ici en interview avec Bruno Cingala-Mata, Jessica couvre l’actualité du SLUC Nancy Basket toute la saison pour l’« Est Républicain ».
« Sur le pôle « Est Républicain » « Vosges Matin », nous sommes deux avec Laura Maurice (journaliste sportive au « Républicain Lorrain ») mais elle va surtout faire le handball à Lille. Il y aura aussi Jérôme Fleury (chef des sports en Franche-Comté). Je vais prendre tous les athlètes du « Républicain Lorrain » comme par exemple Magda Wiet-Hénin (taekwondoïste) que je suis allée voir à Strasbourg ou Clémence Beretta (marcheuse) dans les Vosges. Il y a un gros travail en amont. C’est important de créer du contact et du lien avec les athlètes, ça facilite les contacts. Il y aura également Lucas Kryzs (tireur), Hugo Beurey (rameur), Ugo Humbert (tennis), Auriana Lazraq-Khlass (pentathlète et heptathlète), les joueuses du Metz Handball… On sera également présents sur les réseaux sociaux avec des directs en live et des vidéos. Mais il y a plein de choses que l’on n’a pas le droit de filmer comme le logo des JO et les anneaux olympiques. Nous n’avons pas le droit de prendre des photos ou vidéos dans certains lieux car il y a des photographes accrédités et « France Télévision » a payé pour les droits TV. « Je vais prendre tous les athlètes du « Républicain Lorrain » comme par exemple Magda Wiet-Hénin (taekwondoïste) que je suis allée voir à Strasbourg […] » Il y a de l’appréhension ? « Énormément, parce qu’il y a de l’attente. Il y a une réunion chaque mois à Paris avec les rédacteurs du groupe EBRA. Les athlètes ont la pression mais les journalistes aussi. On marche à l’aveugle au jour le jour à cause de l’organisation. Le climat politique va aussi changer des petites choses (interview réalisée avant le second tour des élections législatives). C’est difficile de prendre une longueur d’avance sur ce genre d’évènement mais c’est ce qui forge un journaliste. On n’y va pas pour se balader. » Tes sports de prédilections sont le rugby et le basket. Penses-tu que les athlètes français sont capables d’aller chercher une médaille dans ces disciplines ? « Je vais pouvoir couvrir un peu le basket, les quarts et demi-finales de la France si les équipes parviennent à aller jusque-là. C’est un cadeau que l’on m’a fait. On a une équipe taillée pour aller chercher une médaille. Je rêve d’un France-Etats-Unis en finale mais c’est impossible au niveau du calendrier. Pour moi, les filles aussi bien que les garçons sont capables d’aller chercher quelque chose. Pour le rugby à sept, l’équipe sera aidée par Antoine Dupont, mais pour les filles, ça sera plus compliqué. Le circuit est relevé et le rugby à sept est tout jeune dans les JO (entrée en 2016 à Rio). Outre ces deux sports, je pense que Magda Wiet-Hénin a une chance de médaille tout comme Sara Balzer en escrime. On est chez nous, il va falloir prouver deux fois plus. »
L’organisation a beaucoup fait débat. Certains l’ont pointée du doigt et d’autres sont plutôt enthousiastes. Quel regard as-tu là-dessus ? « A chaque réunion on nous met en garde, il y a des risques d’attentats. On a eu une viso sur la cybersécurité. Un événement comme ça est soumis aux risques. En termes d’organisation, je suis toujours perplexe. On ne sait pas si la cérémonie sera sur la Seine. Il y a plein de choses qui nous impactent sur notre organisation et c’est assez problématique pour nous qui devons travailler dessus. Je suis de Paris, ma famille et mes amis me disent qu’ils ne veulent pas être là pendant les JO. Ça peut créer un climat anxiogène mais on verra. Tant qu’on ne le vit pas, c’est difficile de juger. Il va y avoir en plus les événements en dehors de Paris. Il faudra prendre une navette à chaque déplacement, c’est une logistique particulière. La seule facilité que l’on va avoir c’est qu’il n’y aura pas la question du décalage horaire. Nous sommes dix-sept en tout et seront tous logés à Beaugrenelle. On prend possession des lieux le 24 juillet. Les JO, j’y suis déjà depuis six mois. Plus mes proches en parlent, plus ma tête va bouillir. On nous a conseillé de prendre des vacances avant pour avoir la tête fraiche. J’ai pris quatre jours au Portugal avant de partir mais ils vont être difficiles à gérer. » Une édition des JO, un exploit sportif, un athlète qui t’a marquée ? « Les équipes de France de handball m’ont toujours impressionnée. Sur l’équipe masculine, en 90, elle était l’une des pires équipes d’Europe, et quand on regarde ce qu’elle est devenue ça m’impressionne. Je dirais aussi le titre de Lavillenie (saut à la perche) en 2012 à Londres. Les JO c’est l’occasion de voir toutes les disciplines que l’on n’a pas l’habitude de voir. Petite, je ne m’arrêtais pas sur une discipline en particulier, j’ai toujours été assez curieuse. » Jessica a pris quelques jours de repos avant de partir pour Paris afin d’avoir la tête libre. Il ne nous reste plus qu’à lui souhaiter bon courage !
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